dimanche 6 juillet 2014

Volatile



Le jour précédent, Poison a invité S’Wari –qui est mélancolique-  à venir se confier à elle lorsqu’elle s’en sentirait le courage. L’heure est venue.


S'Wari s'avance vers la Mamba dont elle a aperçu la silhouette, perchée en haut de la falaise. Là-haut, le vent chaud et humide de la jungle est perceptible, il fait frémir la cime des arbres en contrebas. La vue sur l'enfer vert est imprenable. C'est le matin et le soleil jette ses rayons carmin sur la forêt vierge. S'Wari s'arrête auprès de Poison. Une certaine fatigue se lit sur les traits tirés de son visage mais elle semble avoir repris le dessus sur ses émotions : « Hou Poison ».

Poison dominait la jungle du point de vue unique qu'elle avait choisi. Poison sentira bien entendu la présence de S’Wari près d'elle, elle restera silencieuse, dans l'attente que celle ci s'adresse à elle. Elle lui laissera tout le loisir de venir vers elle sans y être forcée. « Hou S'wari » lui dit-elle avec un sourire, se tournant à nouveau vers la jungle : « on voit tout d'ici, on a l'impression d'être des ants sur une pierre ».

S'Wari contemple le paysage d'un œil admiratif. Il est vrai que le spectacle a de quoi couper le souffle à n'importe qui : de la verdure à perte de vue, entrecoupée de hautes falaises parées de sillons bleus. Des cascades dont le chant grave retentit jusqu'au sommet où elles se trouvent : « C'est impressionnant », admet-elle. Ses prunelles s'accrochent sur le plumage coloré d'un oiseau exotique qui frôle le toit végétal de la jungle. Elle plisse les yeux : cette vision lui rappelle qu'elle n'est pas là pour commenter le paysage : « Je vais te dire toute la vérité, Poison. Pendant quelques temps, tu seras la seule en ce monde à savoir... En dehors de moi. »

Poison garde le visage tourné vers cette partie d'elle, la jungle est pour les mambas la source de leur vie, ils meurent quand ils restent loin d'elle. Le moment n'est pas à la contemplation de ce paradis végétal, mais aux confidences de S'Wari, un membre des Jang'ka et même s'il s'agit d'une inahan, Poison sera tout aussi chaleureuse avec elle. Ses yeux perçants iront chercher ceux de la blonde, ne voulant pas la juger, mais au contraire l'accompagner dans cette mise à nu difficile. Elle hochera la tête sans sourire, « je t'écoute, et cela restera entre toi et moi, tu as ma parole. »

S'Wari oblique à droite pour faire face à son interlocutrice. Leurs regards se fondent l'un dans l'autre. Elle laisse s'écouler quelques secondes, durant lesquelles même la jungle lui paraît s'être tue : « Je suis venue dans la jungle pour me donner la mort. » La phrase tombe comme un couperet. Elle la prononce d'un ton un peu froid qui n'est pas le sien. Sa voix se réchauffe alors qu'elle explique : « J'ai tué, moi-même, mes gardes du corps. » Ses iris ne se détachent pas de ceux de la Mamba. Elle se perd un instant dans leur vert émeraude avant de reprendre : « C'était la première fois, en cent cinquante ans, que je donnais la mort à quelqu'un. »

Poison fronce les sourcils son visage dur au premier abord, se parant d'une douceur peu commune pour une Mamba. Les mots de S'wari la font replonger dans des souvenirs lointains, la première fois qu'elle a tué un homme par exemple, et ce qu'elle a ressenti malgré cette ambiance quasi permanente de la mort parmi les siens et cette ritualisation des corps après. Elle pose une main sur l'épaule de S'Wari, juste pour ressentir par le toucher, l’émotion qui transparait de la jeune femme. « et tu pensais que la jungle ou les mambas te prendraient ta vie? Ne crois- tu pas qu'on te l’a sauvée au contraire ? »

S'Wari pose la main sur celle de la sauvageonne. Ses doigts déliés s'y crispent subtilement. La confession se poursuit : « Non. Je voulais boire la fiole de poison que mon père m'avait donnée plus de cent ans auparavant. » Elle se mordille la lèvre inférieure. Fort. Sa voix vibre sous les émotions : « Je voulais mourir loin de tout, que personne ne puisse m'en empêcher... Que nul ne me retrouve jamais. » Un sourire triste fronce sa bouche de poupée : « J'aurais pu choisir le grand Nord ou le Tahari... Pourquoi la jungle ? Je ne saurais dire. Cela faisait tellement longtemps que je n'y avais pas mis les pieds à Schendi... Il y a des choses qui ne s'expliquent que par le hasard. »

Poison quitte les prunelles de la blonde pour regarder sa main, elle en sent la chaleur, mais aussi l'émotion : « tu as choisi un endroit que tu estimais peut-être être chez toi, on a envie de mourir là où on se sent bien, plus près des siens. On cherche leur contact dans nos derniers instants, pas les personnes vivantes qui pleureront notre mort, mais ceux que l'on voit dans les étoiles et qui ne quittent pas notre cœur J'ai voulu mourir une fois. » Les derniers mots dans sa gorge vibrent d'émotion, elle reprend. « je me suis couchée au pied d'un arbre, avec une dague dans la main, et j'ai regardé le ciel, repensé à ma mère qui est morte m'ayant mise au monde, mais celle que je voulais rejoindre a été celle qui m'en a empêché. » Ses doigts englobent ceux de l'inahan comme une protection, et son regard replonge dans le sien : « et maintenant que décides-tu ? »

S'Wari écarquille les yeux. Ses mots font écho avec la propre histoire de Poison. Elle est d'autant plus émue que la Mamba semble être armée pour pouvoir la comprendre : « Quand je regarde les étoiles, Poison, je ne vois personne. » Elle baisse les yeux, pour la première fois. Le ciel est vide pour elle : « Après avoir tué mes gardes du corps avec ma dague, j'ai sorti la fiole de poison. Je l'ai ouverte. J'étais vraiment déterminée... » Ses prunelles vrillent vers la jungle : « Au moment où je l'élevais pour la boire, un oiseau de la jungle, venu de je ne sais où, s'est posé sur main. » Sa fine menotte se referme sur celle de Poison, « j'ai lâché la fiole sous l'effet de la surprise. Elle s'est brisée sur le sol. L'oiseau s'est envolé, droit dans la direction de votre camp. » Elle ne répond pas à la dernière question. L'a-t-elle oubliée, troublée par les sentiments qui l'agitent ?

Poison écoute le récit gardant les yeux dans ceux de S'wari, et même quand celle-ci les baisse, elle ne bouge pas d'un iota, elle aimerait lui donner sa force, sa détermination par son regard..Elle la sent si perdue comme elle l'était autrefois, « tu as interprété cet oiseau comme un signe, et tu as rejoint le camp, pensant que l'oiseau te disait quelque chose? A ton avis, maintenant, que dirait l'oiseau ? » Elle ne repose pas la question, plus tard. Elle garde la main de la jeune inahan dans la sienne, la serrant un peu plus...

S'Wari éclate de rire. Sans joie et avec acidité : « Oh non. Mais la mort à laquelle j'aspirais s'est simplement trouvée fortement compromise. Je ne crois pas aux présages... J'ai rejoint le camp parce que je ne savais pas où aller. » Elle ajoute d'un ton morbide : « Je ne voulais pas rester là, avec ces deux cadavres autour de moi et cette fiole que j'avais gardée si précieusement durant toutes ces années, brisée. » Son regard s'élève, non pas pour chercher celui de la sauvageonne mais pour aller se perdre dans le ciel : « L'oiseau ne dirait rien. Il n'a jamais rien dit. »

Poison fronce le nez. Elle non plus ne croit pas aux présages en fait... Elle viendra non sans humour lui chuchoter : « tu aurais pu ramener tes amis morts, ca aurait fait un joli cadeau pour l'Inkosi » lui faisant un clin d'œil, « et bien tu es là maintenant, parmi nous, que veux-tu. A quoi aspires-tu ? »

S'Wari lui a déjà livré de tels secrets qu'elle est disposée à lui répondre avec la plus pure sincérité : « Je vais te dire ce que j'éprouve maintenant, Poison. » Ses pupilles viennent à nouveau se planter dans celles de la jeune femme : « Je me sens dévalorisée. » Cela sonne comme un constat, pas comme un reproche : « Tarik est à peine capturée que la voilà déjà à un grade supérieur au mien. » Elle pousse un petit soupir. Il n'y a ni jalousie, ni envie dans son regard, juste une forme un peu amère de déception : « Je suis probablement la plus âgée ici. Je n'ai jamais manifesté le moindre mépris ni la moindre arrogance à votre égard et je sais qu'en terme de survie et de force physique je suis de loin la moins douée », elle poursuit, d'un ton toujours plein d'émotion, « J'ai passé toute ma longue vie à développer ma connaissance du monde, j'ai fréquenté les plus grands botanistes et les plus talentueux médecins. Je parle quasiment toutes les langues de ce monde et même celles des barbares... » Aucune vantardise non plus, dans le timbre de sa voix qui se fait de plus en plus douce : « Et je suis ici, à servir de l'eau et à remuer la soupe dans une marmite. »

Poison se met à sourire à S'Wari, même si la réponse n'avait rien a voir avec ce qu'elle pensait, elle était contente d'entendre cela : « alors moi, je vais te dire ce que j'en pense... Cette envie que tu as de reconnaissance est tout à fait légitime, ta connaissance est un trésor pour les Jang'ka, mais je me souviens d'une jeune fille qui n'aspirait qu'a être esclave du camp, tu as évolué dans cet état d'esprit, cela me fait plaisir..mais ce n'est pas en t'isolant que tu auras ce que tu recherche, au contraire, Tarik est devenue pledge si vite par ses actes, et sa volonté de ne pas être seulement celle qui fait bouillir la marmite, tu comprends ? »

S'Wari pousse un petit soupir : « J'ai cru, en effet, pendant quelques temps, que n'être plus rien était le mieux pour moi. Mais mon esprit est habitué à travailler, à s'activer en permanence. Il dépérit. » Manière assez diplomatique de dire qu'elle s'ennuie à mourir, elle qui est accoutumée à vivre frénétiquement, à écrire ses moindres pensées, à lire et à discuter avec d'autre érudits : « Tu vois, c'est ça le problème, il faut des actes pour être reconnu. Mais celui qui sait est rarement celui qui agit. Ma connaissance est peut-être un trésor pour vous mais moi je ne suis qu'un instrument. » Elle poursuit, toujours avec calme même si une certaine tristesse émane du timbre de sa voix : « Quand je m'isole, que penses-tu que je fais ? Je découvre. J'analyse. J'explore. Je goûte. »

Poison hoche la tête, elle comprend tout à fait que cela ne doit pas être évident de se faire remarquer dans un peuple aussi guerrier et tribal que les mambas pour une femme qui est à dix-mille lieues de l'être : « Tu ne sera jamais une chasseuse, mais tu peux nous apporter quelque chose qui est en toi, dans ta tête, mais ce savoir, il faut le partager…» sa main remonte sur la tempe de la blonde… « Tu gardes ces connaissances pour toi. As-tu discuté avec Killianis, échangé avec lui, ou ne serait-ce qu’Anpao? Découvre tous les secrets de cette jungle, montres nous tes talents, pas qu'à travers ta cuisine, mais ton art, ta maitrise… Il faut te mettre en valeur, et ça personne d'autre que toi le fera… » Elle se met à rire : « moi, je te montrerais comme je dépèce un lart en 2 minutes chrono, ou combien de lances je fabrique en une journée. Nous sommes un peuple de survivants. Les faibles sont écartés, ou tués... ta force est dans ta tête. Fais-nous la découvrir. »

S'Wari laisse son regard se perdre dans les cieux, au-dessus. Ils se défont peu à peu de la couleur rose de l'aurore pour se vêtir d'un bleu azur : « Je ne donne pas à ceux dont je ne reçois rien, Poison. Je l'ai fait durant toute ma vie. Donner, donner, donner... Pour quoi ? » Ses yeux s'emplissent de larmes mais elle les retient adroitement : « J'ai l'impression de vivre ce que j'ai déjà vécu. Comme un cycle infernal, qui se renouvelle pour me narguer. J'ai trop souvent été vers les gens pour me faire rejeter... » Elle inspire une grande bouffée d'air. Elle se reprend : « Je ne veux pas me mettre en valeur, Poison. Je suis un être humain. On me prend comme je suis ou on me dégage mais je ne changerai pas. J'ai toujours aimé partager mon savoir et tu sais, je pense, que je le ferais sans aucune réticence avec toi si tu me le demandais. Mais si vous voulez mon trésor, il va falloir faire un pas vers moi. » Comme en écho avec ses paroles, elle s'avance vers le vide. Elle s'arrête, au bord de la falaise : « Sinon, vous allez me perdre. Je vais me perdre. Mourir ou partir, je ne sais même pas... »

Poison fronce les sourcils, quand S'Wari se détourne d'elle, sa main reviendra se poser sur une de ses épaules mais cette fois de façon plus dure, nerveuse. « la vie est un combat S'Wari encore plus ici qu'ailleurs..si tu veux une part il va falloir devenir plus forte... » Puis à son couplet sur le fait elle répond d'une façon sèche, non pas pour anéantir davantage l'inahan mais pour la booster.. « je n'ai jamais vu quiconque te rejeter au camp, mais comme je t'ai dit tu donnes l'image d'une frêle créature, un giani parmi des larl, on te prend comme tu es au contraire, dans ma tribu tu serais déjà morte ! » dit elle sa voix claquant comme une évidence « on t'a acceptée, tu es une Jang'ka, inahan ou pas... Arrête de vivre avec ton passé... Nous n'en faisons pas partie mais de ton avenir, oui... Là ou je te parle d'échanger, toi tu me parles de donner sans retour. N'interprète pas mes paroles pour te fondre un peu plus dans ta mélancolie... S'WARI ! c'est ton nom maintenant, tu as laissé l'autre au bord de cette falaise » désignant le contrebas, « moi je veux pas connaître Rhiannon, mais S'wari! »

 S'Wari tourne un minois blessé vers Poison : « Je sais. Mais Rhiannon est là. Elle sera toujours là, en moi. Et si tu ne veux pas la connaître, c'est que tu ne veux pas me connaître. » Sa voix aussi se fait plus froide, presque glaciale : « La plupart, ici, ne m'accordent pas la moindre considération. Tu ne le vois pas, moi je le vis chaque jour. Tu me parles d'échanger, soit, j'aimerais qu'on me donne échange une considération qui vaut mon savoir. » Elle souffle, d'un ton acerbe : « Je suis forte, Poison. Tellement que je m'offre le luxe de préférer la mort à une vie qui me rend malheureuse. »
 
Poison replonge son regard dans le sien : « alors, je veux connaitre, celle que tu a été et celle que tu sera, même si Rhiannon est toujours là, elle le sera toujours c'est une partie de toi… Ne montre pas pour donner mais pour te révéler… Par de petites choses, mais surtout arrête de te morfondre dans cette mélancolie, ne crois pas que parce que nous paraissons forts, durs et imperturbables, nous n'avons pas nos peurs et nos faiblesses. Son ton en comparaison de celui de S’Wari se radoucit. : « la mort ne sera jamais une délivrance, prends le cas de Sa'Afi qu'en penses-tu ? Elle est dans la même situation que toi, mais sans aucune connaissances ni talents particuliers, pourquoi elle est devenue pledge ? »

S'Wari ne peut retenir un sourire attendri. L'innocence de Poison la touche. Une vraie leçon de vie. « Je sais que vous avez vos peurs et vos faiblesses, Nous sommes très différents, c'est tout. J'accepte votre différence, tolérez la mienne. » Elle se tourne finalement vers la jeune femme, non sans s'être débarrassée de la risette qui parait ses lèvres : « Parce qu'elle a fait ses preuves, qu'elle a su se mettre en avant. » La réponse est claire et concise. « Je n'ai pas envie de procéder comme ça. Mes preuves, je les ai faites dans l'ombre. C'est ainsi que je fonctionne. Je ne veux pas devenir pledge. Je voudrais simplement un statut qui me permette de faire ce pour quoi je suis douée : étudier. Dès lors, tout mon savoir passé et futur serait mis à votre service au lieu d'être à celui d'Ar. »

Poison soupire, S'Wari reste dans le même schéma de pensée..mais un pas a été fait, elle ne souhaite pas rester inahan. Poison lui rappellera tout de même la hiérarchie. « Aussi érudite que tu sois, on passe tous par des phases d'apprentissage. Tu crois qu'Anpao a toujours été Sangoma? tu crois qu'Hakan a toujours été Akicita ? Cha, ils ont été pledges tous les deux, ce n'est pas une punition mais un passage obligé dans la hiérarchie instaurée par Al'ka. Chez les Banka, mon peuple, c'est totalement différent. C'est du tri sélectif, on ne fait pas de détail, tout le monde subit une série d'épreuves. Si tu en ressors vivant, tu deviens un chasseur. » Poison a de nombreuses cicatrices dues à ces épreuves, qu'elle a réussies, mais qui l'ont laissée dans un sale état. « Je te conseille une chose, je peux être présente si tu le souhaites comme soutien, et ton I'mota, Wakiza aussi. Parle de cette volonté farouche à l'Inkosi, il écoutera au même titre que moi...»

S'Wari se met à sourire à nouveau : « Je ne demande pas à avoir d'autorité sur qui que ce soit, Poison. Je ne prends pas ces passages obligés comme des punitions mais ils nous font perdre du temps, concernant mon cas. Je ne deviendrai jamais une chasseresse, nous le savons tous. A quoi bon fabriquer une fronde alors que je pourrais dessiner les plans d'une baliste pour défendre le camp, si j'avais le matériel et le temps pour le faire ? » Elle semble moins triste, comme si une multitude de projets surgissaient dans son esprit et la plongeaient dans une singulière euphorie : « Si je dois parler à l'Inkosi, j'irai seule. Mais ton soutien me touche. » Elle vient alors poser ses deux mains diaphanes sur les épaules de la Mamba et approche son minois de son visage. Leurs souffles se mêlent : « Merci de m'écouter. Merci d'être là. » Ses yeux plongent dans les siens, s'y noient. 

Poison sourit de sentir la petite blonde reprendre gout à la vie, quand celle ci s'avance vers elle son front ira toucher le sien comme un contact fraternel fort. « Même Killianis a été pledge, tu ne seras jamais une chasseresse, mais les épreuves sont en rapport avec tes aptitudes. L'Inkosi doit voir ce que tu sais faire, et il décidera de l'épreuve pour mettre en exergue ce talent, ce que toi tu fais dans l'ombre, lui le révèlera… » Elle fait une pause, puis dit « je serai toujours là », replongeant dans son regard, « tu fais partie de ma famille S'Wari, aussi blanche sois-tu, aussi différente. Tu es une Jang'ka, ne l'oublie pas. »

S'Wari répond d'une voix dans laquelle perce la déception : « L'Inkosi est trop occupé pour voir cela... » Il lui avait promis de goûter à ses plats et ne l'a jamais fait, alors les connaissances qu'elle accumule, les idées qu'elle s'efforce de retenir... Elle presse son front contre celui de Poison. Elle doute encore, naturellement. Et peut-être qu'un matin, S'Wari partira sur un coup de tête. Mais à l'instant, elle a confiance en Poison : « Je n'oublie rien, jamais », lui murmure-t-elle, ambiguë. Quelques instants s'écoulent ainsi puis la jeune femme retire son visage. Elle se sent plus légère, comme libérée d'un fardeau.

Elle détourne les yeux, les élevant vers le ciel. Un oiseau au plumage coloré fend l'azur de son ombre gracile. Elle croit le reconnaître.

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